Sujet 28Karl Popper, La Société ouverte et ses ennemis4 heures
Série L, Amérique du Sud, novembre 2011
La politique
Explication de texte
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Substituer au gouvernement par la raison le gouvernement par l’amour, c’est ouvrir la voie au gouvernement par la haine, comme Socrate semble l’avoir entrevu quand il dit que la méfiance en la raison ressemble à la méfiance envers l’homme. L’amour n’est ni une garantie d’impartialité, ni un moyen d’éviter les conflits, car on peut différer sur la meilleure manière d’aimer, et plus l’amour est fort, plus fort sera le conflit. Cela ne veut pas dire que l’amour et la haine doivent être placés sur le même plan, mais seulement que nul sentiment, fût-ce l’amour, ne peut remplacer le recours à des institutions fondées sur la raison.
Le règne de l’amour présente d’autres dangers. Aimer son prochain, c’est vouloir le rendre heureux [...]. Mais vouloir le bonheur du peuple est, peut-être, le plus redoutable des idéaux politiques, car il aboutit fatalement à vouloir imposer aux autres une échelle de valeurs supérieures jugées nécessaires à ce bonheur. On verse ainsi dans l’utopie et le romantisme ; et, à vouloir créer le paradis terrestre, on se condamne inévitablement à l’enfer. De là l’intolérance, les guerres de religion, l’Inquisition, avec, à la base, une conception foncièrement erronée de nos devoirs. Que nous ayons le devoir d’aider ceux qui en ont besoin, nul ne le conteste ; mais vouloir le bonheur des autres, c’est trop souvent forcer leur intimité et attenter à leur indépendance.
Karl Popper, La Société ouverte et ses ennemis, © Éditions du Seuil, 1979, pour la traduction française.
La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise. Il faut et il suffit que l’explication tienne compte, par la compréhension précise du texte, du problème dont il est question.
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